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Gaspar Noé From A To Z

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GASPAR NOÉ ET SCHIZOPHRENIA

Article paru dans STARFIX (n° 4, janvier 1999)

 

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SCHIZOPHRENIA vous propose pendant 83 minutes d’entrer dans la tête d’un psycho-killer qui, à peine sorti de prison, va renouer avec ses pulsions meurtrières et massacrer méthodiquement une famille de trois personnes. Le film bénéficie d’une réalisation hallucinante d’inventivité qui vient enrichir le côté clinique du propos. Fan au point de l’avoir vu plus de 25 fois, Gaspar Noé vous propose une visite guidée de SCHIZOPHRENIA.


CENSURE :
A l’époque, le film a été classé X mais il était quand même sorti en vidéo chez CARRERE VIDEO. Apparemment, une version française devait être prévue pour sa sortie en salles mais le film ayant été censuré, il n’est finalement sorti qu’en cassette. Je crois qu’ils avaient un peu raccourci la séquence où il poignarde la fille au milieu du film, et la vide de son sang par le cou. Le film est aujourd’hui toujours classé X car personne n’est revenu sur cette interdiction.


MISE EN SCENE :
Elle est fascinante. Je pense que c’est surtout dû à Zbigniew Rybczynski qui est à la fois cameraman, monteur et co-scénariste du film. Il y a ces plans de grue pour lesquels je ne comprends toujours pas très bien comment ils ont été filmés. Il y a aussi tous ces plans filmés à partir d’un harnais attaché au personnage. Ce n’est pas un système qu’ils ont inventé mais généralement, la caméra est fixe. Dans SCHIZOPHRENIA, elle tourne tout autour du personnage. Ils ont poussé le système beaucoup plus loin. Je pense qu’il y a la fois un système de harnais et de roulement à billes… Je ne sais pas très bien. Gérald Kargl, le réalisateur que j’ai rencontré par la suite, m’a expliqué que le film a été intégralement par réflection dans un miroir Après, ils ont inversé le négatif à la tireuse pour avoir l’image de nouveau à l’endroit.


VOIX-OFF :
Elle est essentielle dans le film. Son utilisation décrit la schizophrénie du personnage. Je crois que c’est le film qui va le plus loin dans la description de la psychopathologie d’un malade. Avec SCHIZOPHRENIA et L’HOMME QUI DORT de Perec, j’ai compris que la voix-off était un support de narration sous-exploité au cinéma. Du coup, cela m’a poussé à en rajouter dans SEUL CONTRE TOUS.


V.F. :
Bizarrement, je prends plus de plaisir à voir SCHIZOPHRENIA en V.F. La V.O. sous-titrée crée une distance alors que le doublage marche mieux pour un film avec beaucoup de voix-off. C’est drôle parce que la voix française de SCHIZOPHRENIA est la même que celle du narrateur de FRISSONS de Cronenberg. J’ai tellement vu le film que dès que je vois un autre film doublé dans les années 80 avec la voix de SCHIZOPHRENIA, je le reconnais au quart de tour.


GERALD KARGL :
Je l’avais rencontré en Autriche. Je crois qu’il s’était pas mal endetté pour faire ce film. Du coup, il a beaucoup bossé dans la pub pour rembourser ses dettes.


ERWIN LEDER :
Je crois qu’après il a joué dans LE BÂTEAU de Wolfgang Petersen. Il a une tête hallucinante. C’est un des rares acteurs qui ressemble vraiment à un malade mental. Il n’y a pas beaucoup de film où juste la tête du personnage m’impressionne. Le copain d’Henry dans HENRY : PORTRAIT OF A SERIAL KILLER ou celui qui jouait dans CLEAN AND SHAVEN n’étaient pas mal non plus.


« LA » SCENE :
J’adore l’intro avec les photos qui racontent la vie du personnage. J’adore aussi le passage où il tue la vieille et qu’il attache sa fille à la porte. Pendant qu’il tue la vieille dame, il pense à sa grand-mère qui l’avait foutu près de la fenêtre pour qu’il meure de froid. Il y a une sorte de dédoublement de personnalité lorsqu’il se rappelle son enfance. Ce décalage est très intéressant.


SERIAL KILLER ? :
Peut-être oui, mais le film n’est pas fait dans une logique de série. Je crois que la plupart des films sur les serial killers jouent sur l’effet de répétition. Ici, cela correspond plutôt à une tranche précise d’une série. C’est un film, certes qui fait peur, mais qui n’est pas destiné à faire peur. Ce n’est pas un film d’exploitation, c’est un film plus ambitieux. Dans l’optique « portrait d’un assassin vu de l’intérieur », je crois que c’est le meilleur que j’aie jamais vu.


FUNNY GAMES :
Autre film autrichien, bizarrement l’histoire rappelle beaucoup celle de SCHIZOPHRENIA. Mais Michael Haneke, que j’ai rencontré, n’a pas vu ce film, méconnu dans son pays. FUNNY GAMES a quelque chose de Wes Craven avec quelques gimmicks et un peu de moralisme européen en plus. Mais la mise en scène de SCHIZOPHRENIA est très chaude alors que la mise en scène de FUNNY GAMES est plutôt froide et conceptuelle. Et même si l’univers des deux films est aussi désespéré, SCHIZOPHRENIA reste beaucoup plus réaliste que FUNNY GAMES.


Thanks to Goliath.

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